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Structure locale des atomes de Gallium dans des nanocristaux magnétiques inclus dans une couche de GaN

Le nitrure de gallium (GaN) et les composés apparentés sont des systèmes de matériaux essentiels pour l'optoélectronique et l'électronique à haute fréquence de pointe. La gamme de leurs fonctionnalités peut être largement étendue en les combinant à des éléments magnétiques. Pour une concentration en cations de Fe supérieure à 0,4 %, il se produit lors de l’élaboration du (Ga,Fe)N par la technique d’épitaxie une séparation de phases cristallographiques du matériau conduisant à la formation de nanocristaux (NC) de (Ga,Fe)N riches en Fe. Grâce à un ajustement fin des paramètres de l’épitaxie, on peut obtenir des plans de NC magnétiques cubiques de GayFe4-yN (0 < y < 1) inclus dans la couche hôte de GaN, dont les propriétés magnétiques dépendent de la concentration en Ga dans les NC.

Afin de distinguer les atomes de Ga dans les nanocristaux de ceux de la matrice hôte, un groupe international de chercheurs de l'Université Johannes Kepler à Linz en Autriche, de l'Institut de physique de l'Académie des sciences de Pologne à Varsovie, ainsi que de la ligne de lumière SIRIUS de SOLEIL, ont employé une combinaison de techniques synchrotron AXD et DAFS.

Ces résultats, publiés dans Scientific Reports, permettent de faire la lumière sur la corrélation entre les paramètres de fabrication, la structure locale des atomes, et les propriétés magnétiques globales du système de matériau.

Les échantillons étudiés, schématisés dans la Figure 1a, sont constitués d'une couche de recouvrement de GaN, d’une couche séparée en phases de (Ga,Fe)N, contenant les nanocristaux, formée sur une couche tampon de GaN d'un micron d'épaisseur, elle-même déposée sur un substrat de saphir (Al2O3). La taille, la forme et la densité des nanocristaux cubiques de GayFe4-yN peuvent être ajustées par les conditions de fabrication, ce qui rend ce matériau adapté pour des applications telles que les dispositifs à mémoire magnétique ou à injection de spin.

Figure 1 :
a
Représentation schématique des échantillons de (Ga,Fe)N contenant des nanocristaux inclus.
b Figures de diffraction de rayons X des échantillons examinés présentant un décalage du pic de diffraction des nanocristaux vers les angles supérieurs pour une teneur décroissante en Ga.

La mise en évidence de la qualité cristalline élevée des échantillons ainsi que l'identification des nanocristaux cubiques de GayFe4-yN sont obtenues à partir des figures de diffraction de rayons X présentées dans la Fig. 1b, pour une série d'échantillons fabriqués avec une teneur en Ga allant de 0,07 (pour S1) à 0,30 (pour S5). Le décalage du pic de diffraction des nanocristaux (200) vers les angles supérieurs avec la diminution de la teneur en Ga indique une augmentation des paramètres de maille hors du plan des nanocristaux. Cette augmentation du paramètre de maille pointe vers l'incorporation dans les nanocristaux d'atomes de Ga, dont le rayon atomique est supérieur à celui des atomes de Fe.

Figure 2 :
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Structure cristalline des nanocristaux de GayFe4-yN.
b Volet supérieur : DAFS au seuil K du Ga pour l'échantillon S5 acquis sur le plan de diffraction (002) des nanocristaux avec la fluorescence de la matrice (—) ainsi que le signal de fluorescence de la matrice pure (- -). Encart : carte d'intensité et régions d'intérêt d'obtention des deux spectres. Volet inférieur : spectre différentiel obtenu à partir des deux spectres présentés dans le volet supérieur.
c Transformée de Fourier des spectres DAFS et ajustements relatifs.

La structure locale des nanocristaux inclus a été étudiée par les techniques AXD (diffraction X anomale) et DAFS (diffraction anomalous fine structure) sur la ligne de lumière SIRIUS de SOLEIL. Les expériences ont été réalisées au seuil K du Ga et en choisissant les plans de diffraction (002) de la structure cristalline cubique, censée contenir des atomes de Fe et de Ga, comme illustré sur la Figure 2a.

L'estimation de la concentration en Ga dans les échantillons est obtenue par AXD et DAFS en soustrayant le signal de fond dû à la fluorescence des atomes de Ga (Figure 2b). L'analyse de l'amplitude relative de l'effet anormal ainsi que l'analyse quantitative des spectres DAFS étendus traités par transformée de Fourier représentés dans les Figures 2b et 2c renseignent sur le nombre et la position des atomes de Ga dans la cellule unitaire cristalline.

L'association des techniques AXD et DAFS montre que les atomes de Ga occupent jusqu'à 30 % des positions sur les faces du réseau cristallin des nanocristaux de GayFe4-yN inclus dans le GaN. La configuration obtenue minimise la longueur de la liaison Ga-N ainsi que l'énergie locale. Les propriétés magnétiques des nanocristaux ne sont pas affectées de manière significative par l'incorporation du Ga, avec un caractère ferromagnétique préservé à des températures de Curie jusqu'à 500 K.

Le défi d'arriver à distinguer les atomes de Ga présents dans la matrice hôte de ceux présents dans les nanocristaux inclus (une tâche hors de portée de la spectroscopie d’absorption X conventionnelle) a été relevé sur SIRIUS, par une approche susceptible d'être étendue à un grand nombre de systèmes de matériaux magnétiques séparés en phases.