Aller au menu principal Aller au contenu principal

Pourquoi les télescopes détectent-ils du gaz là où tout ne devrait être que poussière et glace ?

La désorption induite par photons UV de basse énergie (7-14 eV) est reconnue comme efficace pour expliquer la présence de molécules en phase gazeuse à des températures inférieures à leur seuil de condensation sur les grains de poussière, dans les régions très froides du milieu interstellaire (10-30 K). La première étude systématique de films condensés composés de mélanges CO : N2 réalisée à l’aide de la ligne de lumière DESIRS démontre de manière éclatante un processus de désorption indirect très efficace. Ce phénomène met en lumière un transfert d’énergie vers la surface qui explique pourquoi la désorption d’espèces chimiques non absorbantes peut être observée. Cet effet indirect, jusqu’alors peu connu, pourrait contribuer à une meilleure compréhension des rapports d’abondance des molécules dans les régions de formation d’étoiles.

La méthode expérimentale repose sur l’enregistrement de spectres de désorption induite par photon mise au point à l’aide de l’expérience SPICES du laboratoire LPMAA (Université Pierre et Marie Curie) couplée à la ligne de lumière DESIRS. L’irradiation de films de glaces purs (15 monocouches, 10 K) entre 7-14 eV montre une désorption induite par transition électronique très efficace en dessous de 10 eV pour CO (figure 2a en rouge), et très efficace au dessus de 12 eV pour N2 (figure 2a en bleu). Or, dans un mélange homogène CO:N2, les deux espèces désorbent de manière identique (figure 2b). En particulier, on remarque que N2 est photo-désorbée en dessous de 10 eV via l’absorption du rayonnement par CO tandis que CO est photo-désorbée au-dessous de 12 eV via des transitions électroniques de l’azote.

Cette étude montre que la photodésorption résulte de l’effet cumulé des deux espèces et l’efficacité du phénomène dépend fortement de l’homogénéité du film. Compte tenu de la structuration très probable des glaces interstellaires en couches, ce résultat pourrait être à l’origine d’une différentiation des espèces et contribuer à maintenir en phase gazeuse des espèces azotées observées dans les cœurs pré-stellaires.