Aller au menu principal Aller au contenu principal

Comment caractériser l’enroulement d’un nanotube ?

« Nanotube » et « butanone », « nanomètre » et « ornementa » : ces anagrammes illustrent comment le sens naît de l’association des lettres de l’alphabet. De même, les propriétés de la matière découlent de sa structure à l’échelle atomique, c’est-à-dire de la nature et de l’organisation des atomes.

Des chercheurs du Laboratoire de Physique des Solides à Orsay ont proposé une méthodologie simple pour déterminer une structure tubulaire complexe à partir de diagrammes de diffusion X aux grands angles obtenus sur la ligne de lumière CRISTAL à SOLEIL.

Les nanotubes inorganiques mono-parois sont des cylindres creux de diamètre nanométrique avec des propriétés exceptionnelles dans des domaines aussi variés que la nano-électronique, la nano-fluidique, la nano-catalyse et le tri moléculaire. Mais la structure des nanotubes formés d’au moins trois types d’atomes n’est pas connue précisément, ce qui freine la compréhension et le contrôle de leurs propriétés. La question est donc la suivante : comment les atomes sont-ils organisés au sein de ces nanotubes ?

La diffusion des rayons X est une technique de choix pour étudier l’organisation de la matière. Cependant, la dimension latérale nanométrique des objets considérés constitue une limitation importante car elle implique que les diagrammes de diffusion sont principalement composés de pics larges, donnant accès à un nombre très limité de paramètres structuraux. L’utilisation des symétries hélicoïdales et la minimisation d’une énergie semi-empirique rendent possible la détermination d’une structure tubulaire complexe car elle est ainsi réduite à l’évaluation de quelques paramètres géométriques.

Cette méthodologie simple est appliquée aux nanotubes de type « imogolite », qui peuvent être synthétisés avec des fonctionnalités ajustées. Ces nanotubes sont également présents dans la nature où ils sont considérés dans un contexte géologique pour le stockage de carbone, la rétention de cations métalliques ou de radionucléides dans les sols, voire même comme marqueurs de l’évolution climatique sur Mars.

Avec les courbes de diffusion X aux grands angles obtenues sur la ligne CRISTAL, la méthodologie a permis de déterminer les positions des atomes de ces nanotubes et elle a mis en évidence un mode d’enroulement original pour les nanotubes d’imogolite méthylés de composition nominale (OH)3Al2O3Si(Ge)CH3. En effet, la maille élémentaire, formée d’octaèdres (OH)3AlO3 et d’un tétraèdre O3Si(CH3) (ou O3Ge(CH3)), s’enroule sur un cylindre en formant une structure « armchair », à la différence des nanotubes hydroxylés où le mode d’enroulement est dit « zig-zag ».

Au-delà de la résolution de la structure des nanotubes d’imogolite, cette étude propose une méthodologie originale et transférable pour affiner une courbe de diffusion X provenant d’une structure tubulaire complexe. La voie est ainsi ouverte pour la compréhension et le contrôle des propriétés fascinantes de ces objets.

Figure : Structure et enroulement d’un nanotube d’imogolite hydroxylé de composition nominale (OH)3Al2O3GeOH et de son pendant méthylé (OH)3Al2O3GeCH3. Comparaison d’un diagramme de diffusion X expérimental obtenu sur la ligne CRISTAL à SOLEIL avec celui simulé pour une poudre de nanotubes d’alumino-germanate méthylés.