
Découvrez la ligne SMIS, qui est une des deux lignes de spectroscopie infrarouge de SOLEIL, avec la ligne AILES.
SMIS : La spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier
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Nous sommes au bout de la ligne de lumière SMIS. SMIS est une ligne de lumière de SOLEIL qui utilise le rayonnement synchrotron dans le domaine des infrarouges.
Trois appareils équipent le même poste expérimental : le dispositif de conditionnement du faisceau dans lequel celui-ci est rendu parallèle, le spectromètre où il est modulé, et le microscope où il est focalisé sur l'échantillon avant d'être analysé. Le positionnement de la platine qui porte l'échantillon est contrôlable et programmable à l'aide d'un logiciel et peut être positionnée avec une précision inférieure au micron.
Ce poste de spectrométrie, classique dans les laboratoires, dispose d’un atout supplémentaire à SMIS : la brillance de son faisceau infrarouge et la taille microscopique du spot lumineux qui interagit avec l'échantillon.
Le spectromètre est conçu pour faire de la spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier, souvent dénommée « spectroscopie FT-IR ». L'interféromètre est le cœur du dispositif. Il collecte simultanément toutes les longueurs d'onde d'un spectre infrarouge, ce qui réduit considérablement les temps d'acquisition. Il exploite la théorie ondulatoire de la lumière en produisant des interférences. Il comporte deux miroirs, l’un fixe, l’autre mobile ainsi qu’une lame séparatrice semi-transparente. La lame séparatrice divise le faisceau en deux. Une moitié est réfléchie vers le miroir fixe, l’autre est transmise vers le miroir mobile oscillant. À leur retour, les deux moitiés du faisceau se recombinent sur la séparatrice. On voit que le chemin optique du faisceau venant du miroir oscillant varie avec la position de ce miroir. Le résultat en termes d'ondes, c'est que les deux faisceaux sont déphasés et se recombinent en interférant. Ainsi, le faisceau qui se dirige vers le microscope possède une information sur chaque longueur d'onde du rayonnement infrarouge, c'est le principe de la spectroscopie à transformée de Fourier.
Le microscope est composé, entre autres, du porte-échantillon et du détecteur. Le détecteur enregistre l'interférogramme, c'est-à-dire le signal électrique représentant la somme de toutes les longueurs d'onde du faisceau. Le premier interférogramme est enregistré sans échantillon. Lors d'une analyse, l’acquisition des données s'effectue en effet en plusieurs étapes :
- D'abord l'interférogramme sans échantillon est converti en un spectre infrarouge par transformée de Fourier, une opération mathématique très rapide effectuée par l’ordinateur.
- Ensuite, l’échantillon est positionné sur la platine de déplacement. L'interférogramme de l’échantillon est enregistré et converti en spectre infrarouge, toujours par transformée de Fourier.
Chacune de ces opérations prend moins d'une minute.
Le rapport entre les deux spectres permet de mettre en évidence les absorptions dues à l’échantillon. C'est pourquoi on l'appelle spectre d'absorption.
Pourquoi ces pics d'absorption ? Parce qu'à certaines longueurs d'onde, les espèces chimiques présentes dans l'échantillon absorbent le rayonnement infrarouge à des énergies de vibration spécifiques. La longueur d'onde des pics et leur intensité permettent d’établir la nature, la composition chimique relative des composants de l'échantillon.
Par exemple sur ce spectre d'un échantillon de tissu biologique, on reconnaît la liaison C-O peptidique, caractéristique de la présence et de la structure des protéines à environ 1650 cm-1. On reconnait également les liaisons des C-H aliphatiques entre 2800 et 3000 cm-1, souvent caractéristiques de la présence de lipides, et un pic à 3300 cm-1 caractéristique des liaisons N-H des protéines.
L'analyse du spectre d'absorption est souvent complétée par l'imagerie. Le balayage de l'échantillon permet d'acquérir un spectre sur chaque pixel et, à partir du spectre enregistré, de sélectionner une entité chimique et d’en faire une cartographie. L’image de la répartition du composé est ainsi superposée à celle de la microscopie optique afin d'obtenir la carte chimique d’un des composés de l'échantillon.
Il s'agit ici d'une coupe de tissu de foie. Les cellules gorgées de graisse indiquent une stéatose, une maladie qui peut évoluer vers la cirrhose et parfois le cancer, d'où l'intérêt d'un dépistage précoce.
L'examen classique par imagerie médicale, IRM, échographie, scanner, aurait diagnostiqué la maladie, mais à un stade déjà avancé. Une biopsie de quelques microns, analysée à différentes longueurs d'onde par le rayonnement synchrotron, permet de détecter la maladie au moment où elle s'amorce, au cœur des cellules.
Cet exemple illustre les applications de la ligne SMIS en biologie, mais la microscopie infrarouge utilisant le rayonnement synchrotron couvre beaucoup d'autres disciplines comme l'archéologie, la géologie ou la science des polymères.