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Une image électronique nette du processus d’ionisation

L’ionisation est un processus que les scientifiques étudient de plus en plus près. Malheureusement, ils étaient jusqu’à présents confrontés à un brouillage des images provoqué par le noyau des atomes. Une équipe internationale a récemment réussi à obtenir une image nette de l’ionisation du Xénon.

DESIRS – Une image électronique nette du processus d’ionisation

Quand un atome ou une molécule absorbe un photon d’énergie suffisante, cela peut engendrer l’émission d’un électron, et donc la création d’un ion chargé positivement. Généralement, il y a peu d’interaction magnétique entre l’électron émis et le noyau : l’énergie et la direction d’émission de l’électron ne dépendent que de la configuration électronique des atomes et des caractéristiques du photon. Ainsi différents isotopes d’un même atome (avec la même structure électronique mais un nombre de neutrons différent), ayant un spin nul (cf en dessous) présentent la même dynamique électronique, c’est-à-dire des électrons émis de même énergie et distribution angulaire. Cependant, les noyaux ont très souvent un spin non nul : lorsque les neutrons et protons du noyau sont arrangés de telle sorte qu’ils créent un champ magnétique. Dans certaines conditions, le noyau peut exercer une force sur les électrons émis par l’intermédiaire de ce champ magnétique, qui modifiera alors leur distribution angulaire. En résulte un brouillage de la distribution angulaire des électrons émis par des atomes avec un spin nucléaire non nul.

Des expériences, impliquant des scientifiques de l’Institut de Structure de la Matière en Italie, du Skobeletsy institut de Physique Nucléaire en Russie, de l’European XFEL GmBH en Allemagne, de l’ISMO-CNRS Université Paris-Sud et du Synchrotron SOLEIL en France ont été menées sur la ligne de lumière DESIRS à SOLEIL. Elles avaient pour but de montrer ces effets en mesurant les distributions angulaires des électrons émis par l’ionisation à deux photons d’atomes de Xénon. Dans un premier temps, l’équipe a préparé les atomes de xénon dans des états bien  précis en les excitant à l’aise d’un seul photon émanant du rayonnement synchrotron. Les atomes ainsi obtenus constituent un ensemble d’atomes excités qui « pointent » dans une seule direction, dans l’axe de la direction de polarisation de la lumière excitante. Puis un second photon, issu d’un laser visible, est utilisé pour ionisé ces atomes. La distribution angulaire des électrons émis est alors mesurée. Par distribution angulaire, il faut ici comprendre la probabilité d’émission des électrons dans chaque direction, considérant la direction de polarisation de la lumière. L’astuce de l’expérience consiste à toujours ne ioniser qu’un seul atome à la fois, permettant aux scientifiques de suivre à la trace la masse (et donc le nombre de protons et de neutrons) des ions formés correspondant à chaque électron. Le xénon s’avère être un bon sujet de test, car environ la moitié de ses isotopes ont un spin nucléaire non nul. En utilisant cette méthode, on peut reconstruire la distribution angulaire des électrons issus des ions 129 Xe ( de spin nucléaire I=1/2) et celle des électrons issus des ions 132,134 ou 136Xe (tous de spin nucléaire I=0). Comme le montre la figure 1, la distribution angulaire des électrons présente beaucoup plus de composantes dans le cas des électrons collectés avec le 129 X. Comme abordé plus haut, tout ceci résulte en fait du brouillage électronique lié au spin nucléaire non-nul.

Une analyse quantitative de ces effets permet aux chercheurs de comprendre plus clairement la dynamique électronique du processus de photoionisation, grâce à une comparaison plus directe des résultats obtenus avec la théorie. Par ailleurs, ces expériences sont aussi un moyen d’obtenir des informations sur le noyau atomique : Le brouillage est lié à l’intensité du champ magnétique créé par le noyau.

Figure 1 : Représentation des photoélectrons pour des polarisations parallèles de lumières issues du rayonnement synchrotron et du laser. E haut un isotope de xénon de spin nucléaire non nul et en bas les isotopes de spin nucléaire nul. Copyright: American Physical Society