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Suivi 3D de réactions enzymatiques in Situ

La chimie verte est en pleine essor, poussée par l’intérêt croissant pour les probiotiques (et leur impact pour la santé) et la production de bio-carburant. Ainsi les scientifiques multiplient les études sur la dégradation enzymatiques de biopolymères tels que l’amidon et la ligno-cellulose. L’hydrolyse de ces substrats solides, qui peut durer plusieurs heures, dépend de leurs structures semi-cristallines, qui peuvent limiter la diffusion d’enzymes et donc réduire leur dégradation.

Représentation 3D de l’autofluorescence de l’amylase

 

Une étude réalisée par les chercheurs de la ligne de lumière DISCO à SOLEIL, de l’INRA (BIA, Nantes, France) et de Novozymes (Novozymes A/S, Krogshoejvej 36, 2880 Bagsvaerd, Danemark), a permis de suivre in situ les voies de dégradation de deux enzymes de la famille des amylases (appelées AFA et RA) optimisées pour la production de bio carburant. L’hydrolyse de grains d’amidon a été suivie par autofluorescence du tryptophane (dans la gamme de l’UV lointain). Le microscope plein champ développé sur la ligne DISCO a permis de représenter en 3 dimensions l’interaction enzyme substrat au cours de la réaction, jusqu’à 10 heures. C’est la première fois qu’un dispositif sans aucun marquage fluorescent permet de suivre l’évolution en 3 dimensions de la dégradation de grains d’amidon.

Les chercheurs ont ainsi mis en évidence que le phénomène était extrêmement variable d’un granule à l’autre mais surtout d’une enzyme à l’autre. Si les deux amylases ont tendance à s’attaquer d’abord à la partie centrale la plus épaisse du granule, elles se ne diffusent pas de la même manière pendant l’hydrolyse. Le suivi en 3 dimensions a permis d’identifier deux voies de dégradations antagonistes avec notamment une action de RA du centre vers l’extérieur du grain. La différence provient probablement du potentiel de liaison différent chez ces deux enzymes, jamais observé jusqu’à maintenant en 3 dimensions.

 

Au final, les chercheurs de la ligne DISCO ont pu utiliser un dispositif unique de suivi de réaction par autofluorescence, c’est-à-dire sans incorporer de substance dans le milieu susceptible d’influer sur les résultats obtenus. Ce suivi en 3D est un outil particulièrement efficace pour améliorer nos connaissances des mécanismes enzymatiques, et pourrait avoir de nombreux débouchés dans le domaine de la chimie analytique, du développement durable, des biotechnologies ou des biocarburants.


 Figure 1. Visualisation de l’hydrolyse des grains d’amidon de maïs par l’enzyme AFA à :  (a) 5, (b) 45, (c) 90, (d) 135, (e) 180, (f) 315, et (g) 360 min. L’échelle de l’image (a) est 5 μm.

 

 

Figure 2. Visualisation de l’hydrolyse des grains d’amidon de maïs par l’enzyme RA à : (a) 10, (b) 45, (c) 70, (d) 130, (e) 250, (f) 310, (g) 370, et (h) 610 min. L’échelle de l’image (a) est 2 μm.