Aller au menu principal Aller au contenu principal

Sel d’europium à valence mixte Eu2+/Eu3+ : Couplage de techniques de photoémission pour une première caractérisation spectroscopique complète

Après avoir permis de mettre en évidence la coexistence d’ions Eu2+/Eu3+ dans le sel d'EuCl3 hydraté qui s’est ainsi révélé être du sel d’EuCl2,85 (cf étude de 2013 publiée dans J. Phys Chem. C), une nouvelle avancée a été réalisée sur la ligne TEMPO. Une équipe de chercheurs de l’IRAMIS (Saclay), de l’ILM (Lyon) et de l’ICMR (Reims) en collaboration avec les chercheurs de la ligne TEMPO a effectué une caractérisation complète de ce solide ionique en combinant les techniques de spectroscopies de photoémission de niveau de cœur et de photoémission résonnante. Une telle étude n’avait jamais été réalisée sur un solide ionique à base d’europium.

Les ions lanthanides, tels que l’Europium, présentent de bonnes qualités photoniques, comme la pureté spectrale. Les applications utilisant des ions europium, et notamment Eu3+, connaissent un nouvel essor en photonique avec les diodes lumineuses organiques (OLED), les lasers, les communications optiques et en tant que marqueurs fluorescents dans les systèmes biologiques ; ce sont par ailleurs des candidats intéressants pour les qubits.

Les ions Eu2+ ne possèdent pas les mêmes propriétés optiques et électroniques que les ions Eu3+. La luminescence rouge très fine des ions Eu3+, semblable à une raie atomique, est à l'origine de l'intérêt que ces ions suscitent pour des applications. La lumière émise est principalement issue de la transition électronique à l'intérieur de la couche électronique 4f partiellement remplie. Au contraire, Eu2+ présente une bande d'émission large dans l'UV et dispose d'une faible efficacité quantique.

Une détermination précise de la composition du sel d'EuCl3 et une meilleure compréhension de la distribution spatiale des deux types d’ions dans ce solide sont donc susceptibles d’apporter des informations importantes sur la conductivité attendue de ce sel.

Les sels d’europium ont jusqu’alors fait l’objet de peu d’études, et il manque notamment des données concernant les interactions potentielles entre les ions Eu2+, Eu3+et des ligands, interactions qui limitent souvent les performances des dispositifs impliquant ces ions ; or de telles informations sont nécessaires pour envisager le développement de tels dispositifs.

Du fait de sa haute sensibilité chimique, la spectroscopie d’absorption NEXAFS est une technique de choix pour l’étude des composés à valence mixte. Mais elle nécessite une référence spectroscopique pour l’attribution des propriétés électroniques et de la composition chimique de l’échantillon. Par ailleurs, sur des échantillons solides comme ces sels, de multiples effets de surface complexifient beaucoup l’interprétation des spectres de photoémission.

Figure europium

Figure : (a) Spectre d’absorption XANES mesuré sur un échantillon de sel de valence mixte EuCl2,85 déposé sur une surface d’or, au seuil d’absorption Eu M4,5, en rendement total d’électrons. (b) Carte de photoémission résonante mesurée au seuil d’absorption M4,5. La partie à droite correspond aux transitions 3d3/2 -4f. La partie à gauche correspond aux transitions 3d5/2 -4f, les pointillés délimitent la zone des états résonants localisés.

Les chercheurs ont alors choisi d’utiliser une combinaison de 2 spectroscopies de photoémission : HRPES et RPES, associées à la spectroscopie NEXAFS, afin de s’affranchir de ces limitations. Cela leur a permis de faire une comparaison de la sensibilité chimique (aux différents degrés d’oxydation) de chaque technique, afin de pouvoir déterminer avec précision les concentrations des différentes espèces.

Ils ont ainsi réussi à déterminer à la fois la composition et la distribution des différents oxydes à la surface du sel, fournissant ainsi la première référence pour la structure électronique d’EuCl2,85.

Il est apparu que les ions Eu2+ sont distribués de façon homogène dans le cristal, conduisant à un dopage n du matériau.

De plus, cette combinaison de techniques spectroscopiques montre une très haute sensibilité aux espèces chimiques : jusqu’à 0,1% atomique, ce qui en fait une alternative intéressante à l’analyse chimique conventionnelle pour détecter des impuretés à très basse concentration.