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Piles à combustible et réduction de l’oxygène : la structure des sites actifs de potentiels catalyseurs dévoilée

À l’heure de la transition énergétique, la réaction de réduction de l’oxygène (RRO) est un processus clé dans le fonctionnement des piles à combustible à membrane d’échange de protons. Celles-ci utilisent l’H2 comme vecteur d’énergie et pourraient permettre l’alimentation des voitures de demain. L’enjeu est donc de taille. Une équipe de chercheurs de SOLEIL, en collaboration avec une équipe de l’Institut Charles Gerhardt de Montpellier (UMR 5253, CNRS/Université Montpellier) a identifié la structure des sites actifs possibles qui catalysent cette réaction.

Cela fait maintenant plusieurs années que les catalyseurs de type Métal-N-C sont étudiés dans l’objectif de se substituer au platine, qui assure pour le moment la catalyse de la RRO dans les dispositifs commerciaux, mais dont les réserves limitées et le coût élevé deviennent problématiques. L’un des métaux envisagé étant le fer, des composés de formule FeNxCy ont notamment été proposés comme catalyseurs potentiels de la réaction. Jusqu’ici, la structure de leur site actif restait encore nébuleuse.

Via spectroscopie d’absorption des rayons X réalisée sur la ligne de lumière SAMBA, les chercheurs se sont intéressés à la structure des sites actifs présents dans les catalyseurs à base de fer.  Un catalyseur a été préparé par pyrolyse à très haute température à partir de précurseurs contenant fer, azote et carbone. Ont alors été obtenus des couches de graphène dans lesquels les atomes de fer sont dispersés mais sont fortement coordonnés par des atomes d’azote, qui dopent le support carboné. La méthode développée pour la synthèse des catalyseurs évite la formation d’espèces de fer inactif cristallines, qui rendait jusqu’à présent très complexe l’étude structurelle de ces matériaux.

Les différents catalyseurs ont ensuite été analysés par spectroscopie EXAFS[1] (Extended X ray Absorption Fine Structure). Les longueurs des différentes liaisons ont ainsi pu être déterminées, mais cette technique ne permet pas de calculer avec précision le nombre de coordination et l’architecture du site actif. L’étude a donc été approfondie par l’utilisation de la spectroscopie XANES[2] (X-Ray Absorption Near Edge Structure), méthode plus sensible à l’arrangement atomique. La modélisation par des calculs théoriques des spectres XANES a permis de déterminer qu’il s’agissait de sites FeN4C12 et ont ainsi révélé l’existence d’un site catalytique basé sur une architecture porphyrinique. Dans cet agencement, le site actif FeN4 joue le rôle de jonction entre deux plans de graphène. Ce résultat invalide donc la structure pyrinidique précédemment supposée.

Figure : Architecture porphyrinique du site actif

Les chercheurs se sont ensuite intéressés aux capacités de liaison des catalyseurs avec le dioxygène, toujours en utilisant la spectroscopie XANES. Ils ont ainsi identifié deux structures compatibles avec les spectres XANES obtenus, soit deux principaux types de sites actifs. Cette découverte a par ailleurs été confirmée par spectroscopie Mössbauer réalisée sur ces mêmes catalyseurs.

Cette étude représente une réelle avancée dans la compréhension de la structure de ces sites actifs et aura une importance fondamentale pour comprendre les futures études in situ et in operando. Elle ouvre également la voie à de nouvelles recherches utilisant la spectroscopie XANES pour l’étude de la structure des catalyseurs  sans platine pour les piles à combustible. 

[1] Dans cette technique, on éclaire l’échantillon par un faisceau de rayons X dont on fait varier l’énergie. Lorsque le rayonnement envoyé correspond à l’énergie de transition de l’un des électrons, un seuil d’absorption est atteint et un électron est éjecté.

[2] Généralement couplée à la technique EXAFS, cette méthode d’analyse spectroscopique renseigne de manière plus précise sur le voisinage atomique et sur l’état d’oxydation du composé étudié. Comme pour l’EXAFS, elle est basée sur l’excitation par photon d’un électron de niveau de cœur vers le continuum. Elle se différencie de l’EXAFS par l’échelle d’énergie considérée autour du seuil d’absorption. On parle également de spectroscopie NEXAFS (pour Near-Edge X-ray Absorption Fine Structure).