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Objectif neutralité carbone – un nouveau catalyseur pour la conversion du CO2 étudié en pleine action

Des chercheurs Coréens du Gwangju Institute of Science and Technology (GIST) et du Korea Advanced Institute of Science & Technology (KAIST), et une équipe française du Laboratoire de Chimie Physique Matière et Rayonnement (LCPMR) de Sorbonne Université, ont découvert une information cruciale pour le développement d'un nouveau catalyseur qui devrait augmenter considérablement l'efficacité de conversion du dioxyde de carbone. Une partie de leurs résultats a été obtenue sur la ligne TEMPO de SOLEIL.

Le développement de technologies de conversion des gaz à effet de serre est l'un des sujets les plus importants de discussion parmi les pays de l'OCDE et le G7. Des partenariats industriels-universitaires très actifs consacrent des ressources importantes pour atteindre les normes mondiales de neutralité carbone d'ici 2050. Parmi de nombreuses approches, la conversion du dioxyde de carbone, CO2, en produits à haute valeur commerciale, tels que l'éthanol ou le méthanol, est une voie très prometteuse car elle aide non seulement à progresser vers la neutralité carbone, mais crée également un produit qui peut être utilisé dans la vie quotidienne.

               Néanmoins, la conversion du CO2 en produits utiles sur le plan industriel est un grand défi en raison de la nature intrinsèque du CO2 ; en effet, le CO2 est extrêmement stable et difficilement dissociable. De plus, aucun catalyseur idéal n'a été identifié pour favoriser la dissociation du CO2.

Des chercheurs du GIST, du KAIST et de Sorbonne Université se sont penchés sur cette question et ont fourni des informations essentielles sur la manière dont le catalyseur doit être préparé pour favoriser la dissociation/conversion du CO2, grâce à la spectroscopie à rayons X de photoélectrons à pression ambiante (NAP-XPS) sur la ligne de lumière TEMPO à SOLEIL et à la microscopie à effet tunnel à pression ambiante (AP-STM) en Corée.

               L'équipe de recherche s'est concentrée sur le fait que la réactivité du CO2 peut varier en fonction de la structure de la surface du matériau catalytique. Avec l'utilisation de la microscopie AP-STM, l'équipe a imagé, en temps réel, le processus de décomposition des molécules de CO2 réagissant avec une surface de cuivre ultra-fine dont la surface présente des marches (figure 1) d’une épaisseur de l’ordre de 1/1.000.000è de celle d'un cheveu humain (qui est d’environ 0,1 mm). De plus, afin de préciser le processus de conversion chimique à la surface du cuivre, l'équipe a utilisé la spectroscopie NAP-XPS à SOLEIL pour identifier les liaisons chimiques formées lorsque le CO2 réagit avec cette surface.

Figure 1 : schéma de la surface du catalyseur Cu(997), constituée d’atomes de cuivre disposés en une succession de « terrasses » se chevauchant pour former des « marches ». La hauteur d’une marche est inférieure au nanomètre.

Grâce à la combinaison de ces deux approches, les équipes de recherche ont découvert que la dissociation du CO2 - qui commence sur les bords de marches et se propage sur les terrasses - conduit à une reconstruction de la surface qui modifie sa morphologie, associée à une signature chimique unique. Ce comportement a pu être mis en évidence par NAP-XPS à SOLEIL lors de l’exposition de la surface directement au CO (voir figure 2), molécule produite lors de la dissociation du CO2. Le CO est en effet l’élément clé car il neutralise généralement la surface en s’adsorbant sur les sites actifs. Il est donc essentiel d’étudier le comportement d’une surface exposée au CO. L’équipe a pu montrer que les molécules de CO s’adsorbent préférentiellement sur les bords de marche mais peuvent migrer et induisent un réarrangement des atomes de cuivre en produisant de nouveaux sites d’adsorption. La nouvelle morphologie de la surface du catalyseur serait à l'origine de l'amélioration du rendement de la réaction de dissociation du CO2.

Figure 2. Observations de l’évolution en temps réel de la morphologie de la surface de cuivre de type Cu(997) dans des conditions de gaz CO de 1 mbar (T = 300K).] A gauche : images AP-STM prises 29 (a), 37 (b) et 66 min (c) après exposition au CO. (d) Spectres NAP-XPS du niveau de cœur O 1s (hν = 680 eV) en ultra haut vide UHV (en bas) et sous 2.10−8 mbar (au milieu) et 0,2 mbar (en haut) de gaz CO. Les différents pics correspondent à l’adsorption d’oxygène atomique par dissociation du CO (529,6 eV), des molécules de CO adsorbées sur différents sites (531,2 et 532,8 eV) et les molécules de CO en phase gaz (538,2 eV) (e) Mesures en fonction du temps des spectres du niveau de cœur O 1s sous une pression de 0,2 mbar de CO.

La voie de réaction dissociative du CO2 observée par les scientifiques est une nouvelle avancée qui va au-delà de la compréhension existante des phénomènes de catalytiques du CO2 à la surface du cuivre. En effet, ces résultats d'investigation fournissent des preuves convaincantes de l'influence des structures morphologiques de surface au niveau atomique en apportant des notions importantes pour le développement de catalyseurs du CO2 à haut rendement.

La dissociation du CO2 sur des nanocatalyseurs de Cu constitués de facettes peut ainsi ouvrir une perspective d'amélioration des rendements de conversion du CO2 en futures sources d'énergie durables dans les procédés industriels, amélioration qui contribuera à réduire le réchauffement climatique actuel causé par les gaz à effet de serre.