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Déformation de nanocristaux sous irradiation

Contrairement à la matière molle, les solides cristallins souffrent beaucoup moins des effets de changement de phase sous illumination. Avec l’émergence de solides de taille nanométrique, cette résistance aux irradiations est remise en cause, comme l’ont montré des chercheurs de l’Institut d’Electronique, de Microélectronique et de Nanotechnologie (IEMN) et de la ligne ANTARES, en analysant des nanocristaux semi-conducteurs dont la structure est dite cœur-coquille.

Les nanocristaux semi-conducteurs sont des particules de taille nanométrique comprise entre 2 et 10 nanomètres, dont les propriétés physiques sont dominées par les effets de confinement quantique. Ils possèdent la particularité d’émettre la lumière à une longueur d’onde définie par leur taille. Matériaux cristallins inorganiques, synthétisés chimiquement à bas coût, ils se dégradent beaucoup moins vite que les fluorophores organiques classiques et sont couramment employés comme marqueurs biologiques. Depuis peu, ils sont aussi intégrés dans des composants optoélectroniques comme des LEDs ou des cellules solaires. 

Leur rendement de fluorescence a été grandement amélioré avec la réalisation d’une coquille constituée d’un matériau semi-conducteur différent, qui passive le cœur du nanocristal et augmente la probabilité d’émission de lumière. Mais cette couche peut également modifier la structure électronique du nanocristal. Le rayonnement synchrotron est une technique appropriée pour sonder les propriétés électroniques des matériaux à hétérostructures semi-conductrices et déterminer leur composition chimique. Appliquée à des nanocristaux dont le cœur était constitué de séléniure de plomb (PbSe) et la coquille de séléniure de cadmium (CdSe), cette technique a révélé un changement électronique et chimique des nanocristaux sous rayonnement UV d’énergie élevée (90 eV). Ce changement correspond à une transition de phase au cours de laquelle le nanocristal passe d’une structure cœur-coquille à une structure de type Janus, formée par deux hémisphères, l’une constituée de séléniure de plomb, l’autre de séléniure de cadmium. 

La déformation du nanocristal provient d’une minimisation de l’énergie interfaciale entre les deux matériaux sous l’effet des irradiations. Cette étude montre que le rayonnement électromagnétique permet de transformer des matériaux de taille nanométrique pour parvenir à des objets qu’il n’est pas possible de fabriquer à partir des méthodes conventionnelles de croissance ou de synthèse chimique.

Figure : (gauche) Evolution des niveaux de cœurs des atomes Pb, Se et Cd de nanocristaux PbSe/CdSe sous irradiation UV par mesures de photoémission. (droite) Image obtenue par microscopie électronique à transmission à haute résolution d’un nanocristal cœur-coquille (bas) et d’un nanocristal de forme Janus (haut).