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Réfrigérateurs moléculaires

Des expériences effectuées sur la ligne DEIMOS par une équipe de chercheurs du Conseil national de la recherche italien (CNR), de l'Université de Manchester et du CNRS ont montré qu'une molécule unique pourrait fonctionner à elle seule comme un réfrigérateur magnétique. Ceci est rendu possible en exploitant les propriétés magnétiques d'une classe spéciale de molécules, des composés organométalliques paramagnétiques qui présentent un comportement particulier nommé l'effet magnétocalorique (MCE, MagnetoCaloric Effect). Cet effet confère aux molécules d'excellentes propriétés réfrigérantes à des températures cryogéniques. « Hormis le caractère de curiosité », explique un chercheur de l'équipe, « ces découvertes ouvrent la voie à la miniaturisation de composants, tels que des détecteurs hautement sensibles d'ondes électromagnétiques, sur une puce comportant une fine couche de molécules réfrigérantes pour refroidir la puce entière. » Leurs résultats sont publiés dans Advanced Materials.

La recherche en nanotechnologie vise à réduire la taille des systèmes et des composants tout en conservant des performances intéressantes jusqu'à des échelles de quelques nanomètres, soit approximativement 10.000 fois moins qu'un cheveu humain. C’est dans ce registre que des chercheurs tentent actuellement de déterminer la taille minimale d'un réfrigérateur.

L’effet magnétocalorique

L'effet magnétocalorique se produit en réalisant un cycle thermodynamique particulier, nommé démagnétisation adiabatique1, qui exploite la variation d'entropie due à l'application puis à la suppression adiabatique d'un champ magnétique externe induisant une diminution de température. L'effet magnétocalorique est quantifié par le changement d'entropie par unité de masse : bien que cet effet se produise dans de nombreux matériaux magnétiques, seuls quelques-uns d'entre eux subissent un changement d'entropie suffisamment important pour les rendre utilisables comme réfrigérants dans la pratique. Pour montrer un fort effet magnétocalorique, les nano-aimants moléculaires doivent être caractérisés par un état fondamental avec un spin élevé et une entropie faible, avoir une faible anisotropie magnétique qui facilite la polarisation en présence d'un champ magnétique, et aussi présenter un excès d'entropie causé par la présence d'états de spin excités de faible énergie. Pour optimiser les performances de refroidissement dans les conditions de travail, il faut que leur masse moléculaire, pour une variation d'entropie magnétique donnée, soit faible.

Une couche d’agrégats moléculaires de fer

Dans les expériences menées à SOLEIL, une couche ultra-fine d'agrégats moléculaires de fer, de formule Fe14 (bta)6, a été déposée sur des substrats et son cycle magnétique a été étudié avec un rayonnement X polarisé. Les substrats utilisés étaient en or ou en graphite (graphite pyrolytique hautement ordonné, ou HOPG). Les échantillons ont été produits par dépôt évaporatif sous ultra vide, ou à partir de solutions liquides utilisant de l'éthanol, du dichlorométhane (DCM) ou de l'acétone comme solvant. La production des substrats de l'échantillon a nécessité l'utilisation contrôlée de techniques telles que la pulvérisation cathodique et le recuit. Pour l'analyse, diverses techniques de mesure des surfaces telles que le STM, XPS, AFP, FTIR, TGA, DSC et MALDI ont été utilisées.

En particulier, l'utilisation du rayonnement synchrotron a permis pour la première fois d'observer un énorme effet magnétocalorique au niveau de la molécule unique, et de prouver que les effets coopératifs tels que l'ordre à longue distance (qui domine dans les réfrigérants magnétiques conventionnels) jouent un rôle mineur dans ce cas.

1 – adiabatique : un processus est dit adiabatique s’il se produit sans qu'aucun transfert thermique n'intervienne entre le système étudié et le milieu extérieur.

Chambres de préparation et caractérisation in situ des échantillons sur la ligne DEIMOS : microscope à effet tunnel (à des températures pouvant varier de 50K à 500K), spectromètres de diffraction d’électrons basse énergie (LEED) et Auger, évaporateurs par faisceau d’électrons, cellules de Knudsen, cellules d’evaporation pour composés organiques, pulvérisation par faisceau d’ions, four (1000°C), boîte à gants.