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Le soutien des foules aux processus biologiques

Les biomolécules (protéines, ADN, sucres, …) sont souvent étudiées dans des solutions purifiées, où elles ont autant d'espace qu’elles le souhaitent pour s’étendre. Mais dans l’organisme, où des milliers de molécules se côtoient et s’encombrent mutuellement, les conditions sont bien différentes. Des chercheurs de l’Institut Pasteur de Paris se sont intéressés à la façon dont l’encombrement moléculaire affecte les protéines, avec comme modèle une protéine dérivée de la toxine CyaA produite par Bordetella pertussis, la bactérie responsable de la coqueluche.

La forme allongée de l’état déplié (unfolded state, à gauche) est favorable à la sécrétion de la protéine (CyaA) à travers le canal de sécrétion de la bactérie. L’encombrement moléculaire, représenté par les objets grisés dans le panneau de droite, aide à maintenir la protéine dépliée dans la bactérie (concentration faible en calcium) et à forcer son repliement dans le milieu extracellulaire (concentration élevée en calcium).

Grâce à des méthodes spectroscopiques, dont le SRCD sur la ligne DISCO à SOLEIL, ils ont montré que l’encombrement pouvait, en présence ou en l’absence de calcium, avoir des effets totalement opposés… mais toujours adaptés à la vie et aux fonctions de la toxine. En l’absence de calcium, comme à l’intérieur de la bactérie, la toxine se présente sous forme dépliée: une configuration étendue idéale pour se faufiler à travers les canaux membranaires étroits de la bactérie. Dans le tractus pulmonaire, en revanche, la forte concentration de calcium provoque le repliement de la toxine secrétée: impossible de repasser par les étroits canaux. Dans ce contexte, l’encombrement aide au contraire la protéine à se replier et à stabiliser sa structure tridimensionnelle, nécessaire pour exercer sa virulence contre nos cellules. De manière remarquable, le soutien des foules, dans les deux cas, est essentiel à la toxine. En perspective, l’équipe de chercheurs souhaite maintenant décrire les propriétés de déplacement des molécules biologiques dans les environnements encombrés que constituent les virus, cellules humaines et bactériennes. Un peu comme comprendre la différence entre se mouvoir dans un métro vide et bondé aux heures de pointes.