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Imagerie magnétique par holographie X : les atouts de la polarisation linéaire…

Des travaux associant l’équipe de la ligne de lumière SEXTANTS à des chercheurs de l’UPMC, de l’Université d’Orsay et du synchrotron italien ELETTRA, montrent qu’il est possible d’utiliser des rayons X polarisés linéairement pour imager les domaines magnétiques dans des couches minces, généralement étudiés en polarisation circulaire. Ces résultats permettent d’envisager un très fort gain d’efficacité dans l'imagerie magnétique par holographie X auprès des sources à impulsions femto-seconde (HHG et lasers-X), lesquelles ne produisent aujourd'hui que des rayons X polarisés linéairement.

En général, pour l'imagerie des domaines magnétiques par holographie des rayons X on accorde l'énergie des photons à une résonance de cœur et on utilise l'effet de dichroïsme circulaire magnétique : le coefficient d'absorption dépendant du signe de l'aimantation, chaque distribution de domaines dans l'objet produit un diagramme spécifique en diffusion cohérente. La transformée de Fourier bidimensionnelle (2D-FT) du diagramme de diffusion donne une image de la structure des domaines magnétiques sous forme de zones claires et sombres, en fonction de la projection locale de l'aimantation sur l'axe de la polarisation des rayons X. L'holographie X trouve un grand nombre d'applications dans les études de la dynamique d'aimantation ultra-rapide auprès des sources X femtoseconde, soit HHG, soit sources laser-X de 4ème génération. Parmi les nombreuses caractéristiques exceptionnelles de ces sources, il existe jusqu'à présent une limitation quant à l'état linéaire de leur polarisation. Une polarisation elliptique est obtenue en ajoutant un polariseur de Faraday, une méthode dont l'efficacité, typiquement de l'ordre de 1 %, n'est pas satisfaisante. Par exemple, un filtre de Faraday à base de Co produit un taux de polarisation circulaire d'environ 30 % au maximum du seuil L3 avec 96 % de perte sur l'intensité incidente (valeurs relatives à la station SXR de LCLS, Stanford). 
Dans l’expérience décrite ici, les chercheurs ont utilisé la radiation synchrotron émise par un onduleur hélicoïdal pour montrer que la lumière polarisée linéairement pouvait offrir le même contraste magnétique qu'un faisceau polarisé circulairement, ce qui suggère qu'un gain d'efficacité d'environ deux ordres de grandeur est possible dans l'holographie par transformée de Fourier (FTH). 

Tout d'abord, le mode FTH a été mis en œuvre avec masque et échantillon séparés, ce qui permet de placer une quelconque partie de l'échantillon dans le champ de vue défini par le masque de cohérence. Dans cette approche, réalisée à SOLEIL, les ondes de référence traversent l'échantillon et subissent elles-mêmes une diffusion magnétique. Par conséquent, une nouvelle méthode a été proposée pour imager des domaines magnétiques perpendiculaires en utilisant des rayons X polarisés linéairement. En s'appuyant sur la rotation Faraday (partie réelle de l'indice) plutôt que sur le dichroïsme circulaire (partie imaginaire) le contraste magnétique est maximal à des énergies inférieures au maximum d'absorption, ce qui permet de gagner en termes d'efficacité de transmission. La Fig. 3 montre que des images de contraste équivalent peuvent être obtenues avec des photons polarisés aussi bien linéairement que circulairement, mais avec des temps d'acquisition plus courts dans le premier cas. Ce point est important pour les expériences à venir sur les sources X-FEL et HHG, pour lesquelles la polarisation circulaire ne peut être obtenue qu'au prix d'une forte réduction d'intensité. Il faut souligner l'importance pour cette étude de disposer d'une source X de polarisation accordable, capable de produire un faisceau 100% polarisé soit circulaire, soit linéaire. L'onduleur hélicoïdal de la ligne SEXTANTS a ainsi permis de comparer de manière quantitative les résultats obtenus pour les différentes polarisations et d'établir la viabilité de l'imagerie magnétique en polarisation linéaire. 

L'imagerie X par diffusion cohérente 

Cette technique utilise pleinement les caractéristiques principales des nouvelles sources de rayons X : degré de cohérence élevé (pour un grand champ de vue), grande intensité et impulsions courtes (pour la résolution temporelle). De plus, l'utilisation de sources X accordables en énergie et en polarisation enrichit cette technique d'une sélectivité chimique et d'une sensibilité magnétique. L'imagerie X en mode holographie par transformée de Fourier (FTH) se base sur l'interférence entre rayons cohérents diffusés par l'objet à imager et par une ou plusieurs références (Fig. 1). Lorsque l'échantillon est éclairé par un front d'onde cohérent, la distribution spatiale des constantes optiques dans l'objet engendre une distribution angulaire unique de l'onde diffusée et cette information est codée en phase et en amplitude au niveau du détecteur via l'interférence avec les ondes de référence (Fig. 2a). La transformée de Fourier du diagramme de diffusion bidimensionnel (2D-FT) donne la fonction d'autocorrélation de l'échantillon entier (objet + références). La corrélation croisée entre objet et références peut être séparée de l'autocorrélation de chacun d'entre eux par une conception adaptée du masque de cohérence (Fig. 2b), ce qui produit une image de l'objet avec une résolution limitée principalement par le diamètre de l'ouverture de référence (Fig. 2c). 

Figure 1 : Image MEB d'un masque de cohérence comportant une ouverture circulaire objet de 2 µm et trois ouvertures de référence placées 5 µm plus loin. Le masque opaque est formé par 1 µm de Au déposé sur un substrat de Si3N4 (F. Fortuna, CSNSM Orsay).

Figure 2 : Exemple d'imagerie pour une multi-couches magnétique (Co/Pd). (a) Digramme de diffusion enregistré avec des photons linéairement polarisés de 777 eV. (b) Zone sélectionnée de la 2D-FT montrant l'autocorrélation de l'échantillon, avec deux images indépendantes de corrélation croisée référence-objet. (c) Zoom sur l'image de corrélation croisée de droite.

Figure 3 : Images holographiques de domaines magnétiques dans une multicouche (Co/Pd) obtenues avec des rayons X 100% polarisés linéairement (gauche, 777 eV) et circulairement (droite, 778 eV).